Enfants de survivants

la transmission du traumatisme chez les enfants des juifs survivants de l'extermination nazi

 

de Nathalie ZAJDE



Nathalie Zajde, Psychologue clinicienne,
maître de conférence à l’université de Paris-VIII,
Nathalie Zajde est chercheur au Centre Georges-Devereux et
chercheur associé au Centre de Recherche Français de Jerusalem

 

   

4ème de couverture

« Je fais de terribles cauchemars et j’aimerais savoir si d’autres enfants de survivants font des cauchemars comme les miens. Je me dis que c’est fou de n’avoir jamais vécu la guerre et de faire des rêves aussi précis. » Pourquoi, dans les familles juives, les enfants des rescapés de l’extermination nazie font-ils les mêmes rêves que leurs parents alors que ceux-ci ont gardé le silence sur le traumatisme qu’ils avaient vécu ? Étayé par des récits finement racontés, ce livre décrit précisément ce que l’on appelle le « syndrome du survivant », qui se manifeste par des cauchemars, un sentiment de terreur intense et d’abandon, une irritabilité particulière et incurable, des souvenirs récurrents, des peurs et des soucis injustifiés… Il montre qu’il est possible aux enfants de survivants de reprendre, grâce aux méthodes de l’ethnopsychiatrie, leur place parmi les vivants.

 


Paris, Odile Jacob,
20 octobre 2005

Dans Libération du 27 janvier 2006…

   
Une critique dans l'Arche, N°429 de 1993 par Maurice Szafran
une critique de Maurice Szafran parue dans l'Arche en mai 1993, à propos du livre de Nathalie Zajde "Souffle sur tous ces morts et qu'ils vivent", réédité en 1995 aux éditions Odile Jacob, sous le titre "Enfants de survivants" —>
   
Des témoignages, des comptes-rendus :  
 
"La documentation qui nous été permis de feuilleter jusqu'à présent, tant à la bibliothèque que sur internet, tend a montrer que les écrivains se sont concentrés davantage sur les événements politiques ainsi que sur les horreurs de la guerre sans toutefois tenter de comprendre les traumatismes vécus par les juifs. Le livre de Nathalie Zajde, Enfants de survivants: la transmission du traumatisme chez les enfants des juifs survivants de l'extermination nazi, est une petite mine d'or grâce à ces nombreux témoignages des survivants. Ce livre permet d'analyser les enjeux psychologiques des juifs dans plusieurs familles et constituant ainsi la première marche de notre recherche. Cependant, à aucune occasion nous avons vu que des écrivains essayer de tenter d'établir une relation entre les conséquences psychologiques des victimes et les conflits qui les hantent depuis."
 
La contagion de l’horreur  
 

Nathalie Zajde Enfants de survivants - La transmission du traumatisme chez les enfants de Juifs survivants de l'extermination nazie
Odile Jacob 2005 / 19.90 € - 130.35 ffr. / 218 pages

Préface de Tobie Nathan.

L'auteur du compte rendu : Antoine Bioy est psychologue clinicien et docteur en psychologie.

L’auteur part du syndrome du survivant chez les rescapés de la Shoah et de l’observation que, chez leur descendance, des signes cliniques analogues à ceux de leurs parents peuvent se retrouver (rêves, etc.). Et ce, même lorsque les évènements vécus par les parents ont été tus. S’ensuit une analyse descriptive des troubles dont il est question, puis une analyse qualitative, avec des entretiens cliniques. Une conceptualisation autour des troubles des enfants de survivants est, au fil des récits, proposée. L’abord proposé est celui de l’ethnopsychiatrie, ici en partie aménagée, en tout cas s’inscrivant dans une orientation analytique.

L’ouvrage de Nathalie Zajde est pour le moins captivant. Bien sûr, il récapitule des idées déjà connues autour du syndrome du survivant, mais il montre également en quoi l’histoire de la Shoah lui donne des connotations et expressions particulières. Également, l’auteur propose une lecture particulière de certains faits psychiques comme celui des rêves. Ainsi, elle écrit : «Chez les survivants, le rêve n’est pas satisfaction hallucinatoire de désirs infantiles refoulés, ses mécanismes ne sont pas des processus primaires, il n’est pas le garant du sommeil, il ne constitue pas la voie royale vers l’inconscient ; il est photographie». Une photographie qui devient narration, et donne ainsi accès à toute une dynamique psychique ici décrite dans ses moindres subtilités. Quant à certains enfants de survivants, leurs problématiques psychiques vont être similaires, mais en ajoutant à la question de la quête identitaire et de la (re)construction de soi, la question du trans-générationnel.

Au fil des entretiens menés, les individualités présentées ouvrent tout un champ d’analyse fécond. L’auteur s’y plonge avec une grande finesse, faisant de son objet d’étude la source d’une grande richesse clinique qui donne matière à penser, notamment sur la question du traumatisme et de l’identité à la fois individuelle et groupale."

Antoine Bioy
( Mis en ligne le 02/03/2006 )
 
 

"Nathalie Zajde est psychologue clinicienne et ethnopsychiatre, auteur d’Enfants de survivants, l’une des études les plus remarquables sur l’héritage traumatique de la Shoah (Odile Jacob, 1995). Comment comprendre, s’interroge-t-elle, que les enfants des rescapés fassent les mêmes rêves et présentent les mêmes symptômes que leurs parents alors que ceux-ci, bien souvent, ont gardé le silence sur ce qu’ils avaient vécu ? Probablement parce que cette transmission s’effectue de manière inconsciente, à l’insu même des protagonistes, autrement que par des mots. Une transmission qui passe à travers les paroles et les gestes apparemment anodins de la vie quotidienne."


Nathalie Zajde
 

Une recension d’Enfants de survivants dans Mémoire Vive, Bulletin d’Aloumim, Association Israélienne des Enfants Cachés en France pendant la Shoah, par Dora Weinberger, Janvier 2009, n°43.

 

sur le site du Fonds Social Juif Unifié (FSJU)…  
 

Enfants de survivants
Auteur : Nathalie Zajde
Editeur :Editions Odile Jacob
Prix :19,90 €
218 Pages

Le syndrome du survivant

Avec la Shoah, les Juifs ont vécu un événement traumatique unique par son ampleur. Sur les neuf millions vivant en Europe avant la guerre, six millions de Juifs ont été exterminés. Pour les survivants encore en vie, le traumatisme, 60 ans après, continue d’être très grand. Analysé et décrypté comme syndrome, il correspond au traumatisme lié à l'effondrement du cadre de vie habituel, car les survivants ont vu leur environnement, après la guerre, se modifier radicalement du jour au lendemain. Leur univers coutumier s'est soudain révélé incertain, inquiétant, dangereux. Ils ont vu leur pays, leur ville, leur famille, leur culture, changer totalement et en profondeur. Leur vie a été infiltrée d'un sentiment permanent de menace, et cela durant plusieurs années. Ils ont vu disparaître leurs proches. Ils sont passés par des temps de rupture. Ce syndrome touche aussi à des degrés divers les descendants des survivants. Se sentant souvent exclus du «vécu» de leurs parents, à cause de l’indicible, difficile à transmettre, ils vivent ce silence comme s’ils se sentaient exclus de leur « groupe d’origine. » Ils ont alors besoin de se réapproprier leur histoire familiale. Cette mission est d’ailleurs très bien décrite dans le film de Liev Schreiber « Tout est illuminé »...

Leur réaction est aussi diverse, comme le rejet de leur filiation juive qui leur devient insupportable.

 

 
Université de Lausanne: Comment les fils et les filles de survivants de la Shoah vivent leur judaïté ? (07/12/2006)  
 

Psychologue, maître de conférence à Paris 8, Nathalie Zajde étudie la question de la transmission intergénérationnelle du traumatisme de la Shoah. Elle anime des ateliers de parole où des fils et des filles de survivants posent parfois d'étranges questions dont ils voudraient être délivrés. Invitée à l'Université de Lausanne par le professeur Jacques Ehrenfreund, titulaire de la toute nouvelle chaire de judaïsme, elle a parlé de son travail. Et proposé que la psychologie intègre le religieux pour trouver des chemins de guérison.

Nathalie Zajde a réalisé au cours de ses recherches que le fait d'être juif n'intéresse pas les psychologues. Ces derniers n'ont jamais pris en considération cette donnée religieuse et identitaire pour soigner les survivants et leurs descendants. « Etre juif n'a aucune valeur scientifique », constate la jeune chercheuse qui estime pour sa part qu'on ne peut faire abstraction du Dieu des Juifs, « psychorigide et qui contraint les gens à être ce qu'ils sont », ni du fait que les nazis ont anéanti tout un peuple et une culture, un monde très ancien disparu en peu de temps, pour la simple raison que ce peuple avait un Dieu juif. Pour comprendre ce que les gens vivent, on ne peut ignorer cette donnée religieuse, encore moins la Shoah qui a eu des effets psychopathologiques sur les survivants et leurs enfants, qui ont modifié leur vie, leur espace social, leur identité et même leur perception du temps.
«Ce ne sont pas les gens qui viennent consulter qui ont un problème, estime Nathalie Zajde, mais la société qui n'a pas encore saisi ce qui s'est passé. C'est en fait l'événement qui a fabriqué des humains souffrants. Etre juif et avoir vécu l'Holocauste, ça a une incidence sur la vie de ceux qui ont survécu. Voir son peuple et toute une culture, fort ancienne, disparaître d'un seul coup, est un traumatisme qui modifie l'espace social et la perception des survivants. Il n'y a plus personne autour d'eux pour dire qui ils étaient, d'où ils viennent. Ils sont terriblement seuls au monde. Ce sont des émigrés clandestins qui préfèrent taire leur histoire, que d'ailleurs personne ne veut véritablement entendre. Pour l'ethno psychologue, il est impossible de faire abstraction de ce que ces gens ont vécu pour trouver un chemin de guérison.

Nathalie Zajde s'est aperçu que la seconde génération, dont elle fait partie, trimballe les mêmes cauchemars récurrents que les survivants. Le génocide a fabriqué des questions dont héritent les enfants des survivants. Ceux-ci hésitent entre la vengeance et la plainte. « J'ai l'habitude de dire aux gens qui viennent dans nos ateliers de parole : Le problème, ce n'est pas vous, mais ce qui vous est arrivé ! ». Elle cherche avec eux des propositions qui peuvent les apaiser, les débarrasser des interrogations qui les hantent, convoquant au besoin leur Dieu, voire même les morts qui n'ont pas été enterrés, pour les libérer de l'errance dans laquelle les survivants pensent qu'ils se trouvent, et du même coup délivrer la génération d'après la Shoah. La psychologie a tout à gagner à intégrer la divinité : telle est la proposition de Nathalie Zajde. « Le nazisme a tué un monde. Ne sont restés que des individus fragiles, qui ont souvent rompu avec le divin. Renouer avec les mythes fondateurs de leur religion peut les aider à surmonter leurs souffrances ; les générations d'après peuvent peut-être mieux comprendre les désirs de leurs vieux parents, telle cette mère qui voulait que sa fille la fasse incinérer, - ce qui est inconcevable dans la religion juive - et qu'elle envoie ses cendres à Auschwitz, auprès des siens morts au camp. (3103 signes) (ProtestInfo/Nicole Métral)

 

Nathalie Zajde, Maître de Conférences en psychologie à l’Université de Paris 8, responsable de recherche au Centre Universitaire Georges-Devereux. Elle a créé, il y a une quinzaine d’années, les premiers groupes de parole de survivants et d’enfants de victimes de la Shoah en France. Elle a publié en 1993, un premier ouvrage « souffle sur tous ces morts et qu’ils vivent » — réédité en 1995 et en 2005 chez Odile Jacob- sous le titre « Enfant de survivants » — dans lequel elle dresse le portrait fidèle de la génération des survivants et des enfants de survivants.

Nathalie Zajde